Le métier d’interprète en langue des signes
Être interprète en langue des signes, c’est un métier qui s’apprend. Cet apprentissage se fait au sein d’universités, en France, à Paris, Toulouse, Rouen et Lille, et est sanctionné par un diplôme, un Master 2 d’interprétation en langue des signes française.
1/ Son rôle
L’interprète est un professionnel formé aux techniques d’interprétations et diplômé. Il intervient aussi bien pour les personnes sourdes que pour les personnes entendantes en interprétant tous les échanges. C’est un pont linguistique et culturel entre deux communautés, celle des sourds et celle des entendants.
Il est bien sûr bilingue et biculturel (il est indispensable d’avoir une excellente connaissance de la culture sourde). Il favorise aussi l’accessibilité à la vie quotidienne, professionnelle, sociale, culturelle et citoyenne des personnes sourdes qui s’expriment en langue des signes (française en l’occurrence). Contrairement aux interprètes de langue vocale qui ne travaillent généralement que vers une langue, l’interprète en langue des signes travaille “dans les deux sens” : il interprète les discours émis en français (oral) vers la langue des signes ou les discours émis en langue des signes vers le français (oral).
Il traduit les textes écrits en français vers la LSF et les discours signés en LSF vers le français écrit.
L’interprète respecte le code éthique de sa profession tel qu’il a été défini par l’Association Française des Interprètes/Traducteurs en Langue des Signes (AFILS). Les 3 règles principales sont :
• le secret professionnel : l’interprète est tenu au secret professionnel, il s’interdit toute exploitation personnelle d’une information confidentielle ;
• la fidélité : l’interprète se doit de restituer le plus fidèlement le message en présence des parties concernées ;
• la neutralité : l’interprète ne peut intervenir dans les échanges et ne peut participer à une conversation qu’il traduit. Il est particulièrement vigilant à rester neutre, aussi bien durant toutes les situations d’interprétation que durant les moments plus informels (pause-café par exemple).
2/ Ses différents types d’interventions
Nous interprétons des situations :
• de liaison (rendez-vous professionnel, social, médical, juridique) ;
• de réunion (entreprise, administration, réunion d’équipe) ;
• de formation (milieu scolaire, universitaire, professionnel) ;
• de conférence (Assemblée générale, séminaire, colloque, débat public, meeting) ;
L’interprète peut aussi intervenir en milieu artistique (visite de musées) , religieux (mariage, enterrement) ou à la télévision (traduction des journaux télévisés). Il peut également interpréter à distance, via la visio-interprétation, afin de relayer un appel téléphonique entre un sourd et un entendant. L’interprète peut refuser une intervention si, pour une raison éthique ou personnelle, il sent que sa prestation ne sera pas conforme à son code déontologique.
A noter : afin de fournir une interprétation optimale, un temps de préparation est indispensable. L’interprète (qui se doit bien sûr de déjà posséder une excellente culture générale) sollicite les intervenants en amont de ses interventions afin de recueillir des informations relatives au contenu des échanges et tout document susceptible de l’aider à améliorer et/ou faciliter sa prestation.
3/ L’organisation de son travail
Un interprète peut travailler :
• en indépendant : micro-entreprise ;
• au sein d’un service d’interprètes en langue des signes comme salarié ou vacataire ;
• au sein de diverses structures nécessitant les services d’un ou plusieurs interprètes comme les Instituts de Jeunes sourds, des établissements spécialisés, des structures hospitalières…
Une journée de travail correspond à 2 vacations (matin, après-midi ou soir) soit 4 heures
d’interprétation effective. En effet, afin de garantir une interprétation de qualité, le nombre d’heures maximum d’interprétation consécutive est de 2h par demi-journée (une pause de 10mn étant à prévoir à l’issue de la 1ère heure d’intervention). Dans les situations nécessitant plus de 2 heures d’interprétation consécutive ou si l’aménagement d’une pause entre les 2 heures n’est pas possible, lors d’une conférence par exemple) un 2ème interprète est nécessaire selon deux modalités possibles :
– les 2 interprètes sont présents durant la période d’intervention avec un relais toutes les 15 à20mn
– un interprète intervient seul pendant la première heure puis un 2ème interprète lui succède pour l’heure suivante (avec une présence conjointe en amont d’au moins 15mn, permettant d’assurer un passage de relais satisfaisant).
Bien que neutre et n’intervenant pas durant les échanges, l’interprète peut être amené à conseiller sur la situation d’interprétation pour garantir les bonnes conditions à son intervention telles que : configuration du lieu, organisation de la situation de communication, placement des différents intervenants, recadrage lorsque son rôle n’est pas bien compris avec si besoin explication des règles déontologiques, etc. Il peut également endosser le rôle de tuteur pour des “élèves-interprètes” en formation.
4/ Sa rémunération
En début de carrière, la rémunération d’un interprète en langue des signes est modeste au regard des 5 années d’études supérieures nécessaires pour être diplômé : 1200 à 1500 € net par mois. Ensuite, après quelques années d’expériences professionnelles elle devient très variable, en fonction des vacations effectuées, du statut…
5/ Une synthèse des compétences
Dans son mémoire de fin d’études mon collègue Christophe Ricono (qui travaille à Ex-aequo,Lyon) a proposé une synthèse des compétences requises par ce métier. Comme je ne ferais pas mieux qui lui, je reproduis son tableau :
6/ Les contraintes du métier
• disponibilité et souplesse (horaires non réguliers, décalés, nécessité de devoir répondre dans l’urgence à une demande, nombreux déplacements) ;
• isolement professionnel ;
• risques sur la santé dus à une usure physique et intellectuelle : TMS, stress,
déplacements (douleurs dorsales…) ;
• fatigue visuelle en visio-interprétation.
Posté le : 19/06/2021